INTERVIEW : Jung Jinhyeong, libéré des chaînes de sa vie d’idol

par Lucile TD

Un démarrage de carrière difficile en Corée, des adieux prématurés à la vie d’idol, une reconnaissance internationale montante ; Jung Jinhyeong ne se laisse pas abattre par le report de son premier show en France, et se dévoile dans une interview.

Bien que reporté en raison du Covid-19, vous avez vendu tous les billets de votre premier show en France. Comment vous sentez-vous ?

C’est incroyable, je ne savais même pas que j’avais des fans à Paris, et je n’étais pas du tout prêt à faire de performance en France. En Corée je suis toujours considéré comme un débutant, un rookie, et je ne suis pas très populaire. Je pensais que c’était pareil à l’étranger, et je n’aurais jamais imaginé avoir cette opportunité un jour. Quand on m’a contacté pour la toute première fois, je pensais qu’il s’agissait d’une blague.

Au départ vous étiez trainee chez YG Entertainment dans le but de devenir idol. Comment c’était ?

Mon expérience à YG Entertainment était à la fois la meilleure, mais aussi la pire de ma vie. J’ai appris à être désespéré. Mais cela reste tout de même une expérience précieuse à mes yeux, puisque c’est à ce moment précis qu’a commencé ma carrière. J’ai appris la vraie vie là-bas.

Était-ce une expérience utile à votre carrière ?

Oui, c’était une expérience très utile pour ma carrière actuelle. Pas mal de personnes ont commencé à reconnaître mon travail. J’étais encore jeune lorsque j’ai rejoint YG Entertainment, et honnêtement cette expérience m’a fait grandir et mûrir très rapidement. Cela m’a aussi beaucoup enseigné sur le plan musical. Il y a beaucoup de bons producteurs dans cette agence qui m’ont ainsi appris à créer ma propre musique, étape par étape, à produire des beats, à composer. J’ai aussi réalisé que je n’étais pas meilleur que les autres, qu’il faut travailler dur pour obtenir ce que l’on veut. Au final, ça m’a appris à rester humble et à garder les pieds sur terre.

Pourquoi avoir mis fin à votre carrière d’idol ?

J’ai quitté ma carrière d’idol parce que je voulais créer ma propre musique. Quand on est idol en Corée, on fait toujours face à des restrictions, on ne peut pas produire ou écrire ce que l’on veut. J’avais envie d’être sincère dans ma musique et d’y exprimer mes propres émotions et pensées. J’ai donc décidé d’aller vers l’underground pour réaliser ce rêve.

Quel est le genre musical qui vous définit le mieux à présent ?

C’est le R&B qui me correspond le mieux. J’aimerais m’épanouir dans un style similaire à celui de l’artiste PARTY NEXT DOOR. J’aime aussi beaucoup la vibe de la scène canadienne, notamment les artistes de Toronto.

D’autres styles que vous aimeriez essayer ?

Pas particulièrement, je n’aime pas prendre de risques. Je veux essayer de nouvelles choses mais ne pas m’éloigner de qui je suis. Plus tard, j’aimerais bien devenir producteur.

Vous avez sorti votre premier EP SOAR l’année dernière, quelle a été votre source d’inspiration ?

Je n’avais pas forcément une source d’inspiration particulière, même si le groupe australien Tame Impala m’a inspiré. La chanson ADDICT était le sujet principal de l’EP, et tout l’opus tourne autour de cette chanson. On peut être addict à beaucoup de choses, que ce soit l’amour, la musique ou même la drogue, la cigarette. Pour ma part je suis accro à la musique, si je n’en fais pas j’éprouve de l’anxiété. J’ai aussi une routine bien à moi pour les jours importants, c’est de m’habiller tout en noir, en accordant même mes sous-vêtements et mes chaussettes. (Rires.)

Chanson extraite de son EP SOAR

Expliquez-nous le concept de SOAR.

Le concept de l’EP est littéralement « SOAR » (qui signifie en français « s’élever, s’envoler »). Vangdale, un ami proche qui est aussi le producteur de mes chansons, m’a dit qu’après avoir quitté YG c’était comme si j’avais fait une chute. La signification de cet EP est ainsi de se relever, de me rediriger vers le haut. SOAR a donc un titre littéral.

Vous travaillez beaucoup avec Vangdale, et il était même programmé sur votre show parisien, comment l’avez-vous rencontré ?

C’est une histoire assez drôle, j’ai rencontré Vangdale lors d’une soirée. Il m’a abordé et m’a demandé si je savais qui il était. J’ai dit oui, puis il m’a demandé de le contacter sur Instagram pour aller dîner. On a donc mangé ensemble et depuis ce jour on ne s’est pas quitté, on travaille ensemble.

Allez-vous continuer de travailler aux côtés de GXXD à l’avenir ?

Mon prochain EP sort en avril, mais il ne sera pas en collaboration avec GXXD. Lorsque je travaille avec un producteur pour une chanson, j’aime bien faire tout l’album avec ce même producteur, c’est plus confortable pour moi que de devoir travailler avec plusieurs personnes différentes. Mais en juillet je sors un autre album qui sera cette fois-ci avec Vangdale.

Avant de vous lancer dans la musique, vous étiez intéressé par l’acting. Avez-vous déjà songé à revenir dessus, même pour essayer quelque chose de nouveau dans votre carrière ?

Non je n’ai jamais pensé à être acteur, c’est trop compliqué. Quand j’étais au lycée j’ai beaucoup appris et c’était vraiment difficile pour moi, je n’arrive pas à faire semblant d’éprouver des émotions ou prétendre être quelqu’un d’autre. J’ai aussi une sorte de petit trauma. Quand j’étais plus jeune je n’aimais pas étudier mes cours de comédie, on m’a donc redirigé vers une école publique peu réputée. Mes parents étant stricts, voulaient une meilleure école pour moi, on m’a donc forcé à apprendre l’acting. Si je devais tenter quelque chose de nouveau et différent de ma carrière actuelle, ce serait la création d’accessoires ou d’objets. J’aime beaucoup tout ce qui est en rapport avec les travaux manuels, et créer des choses de mes propres mains.

Vous allez fêter vos trois ans de carrière cette année, avez-vous préparé quelque chose de spécifique ?

Je ne vois pas ça comme un anniversaire de trois ans. Je suis encore un rookie. Pour être honnête, je ne me considère pas comme un artiste qui a trois ans de carrière. (Rires.)

D’autres projets pour la suite de l’année ?

En avril, je sors un EP avec des compositions au piano, puis en juillet un album avec GXXD. J’ai d’ailleurs fabriqué des accessoires qui sont en vente, et l’argent récolté servira à financer cet album. Je donne toutes les informations sur l’avancée de ce projet sur mon compte Instagram.

Autre titre en collaboration avec GXXD

Qu’est-ce qui vous rend le plus fier dans votre carrière ?

Honnêtement, le fait que j’étais censé me produire à Paris et que l’événement était sold out est la chose dont je suis le plus fier. Je ne réalise toujours pas.

Pensez-vous avoir accompli ce que vous souhaitiez en tant qu’artiste ?

Non pas encore, je suis encore loin de tout ce que je souhaite accomplir. J’ai envie d’apporter mon aide à la future génération, leur apprendre à être à l’aise avec leur musique, les inspirer, leur apprendre à rester humble. Et évidemment je rêverais de faire des concerts à l’occasion d’une tournée.

Quel serait votre prochain objectif, ou votre plus grand rêve ?

Mon prochain objectif serait de faire entrer ma musique dans les charts. Quant à mon plus grand rêve, ce serait d’inspirer les gens, et notamment la nouvelle génération. Je ne veux pas être une rockstar. J’ai envie de rester mystérieux, un peu comme Frank Ocean, d’inspirer le monde mais tout en restant dans l’ombre. J’aimerais aussi ne pas me limiter à la Corée, et faire une tournée mondiale.

Crédits photo 📸 Between Prod