INTERVIEW : Kiggafromthe6, le nouveau visage du hip-hop coréen au Canada

par Lélia S.

Après avoir lancé sa carrière dans le hip-hop à Séoul en 2016 au sein du crew FPL, Kiggafromthe6 est retourné habiter à Toronto où il continue doucement mais sûrement son chemin vers le succès. Ce rappeur coréano-canadien, aussi humble que talentueux, a gentiment accepté de répondre à nos questions pendant le confinement. Découvrez avec nous cet artiste qui mérite bien plus de visibilité !

Pouvez-vous vous présenter brièvement pour nos lecteurs ?

Bonjour, je suis Kiggafromthe6, rappeur et membre des crews FPL et Foreign Flow.

Vous êtes coréano-canadien, pouvez-vous nous en dire plus sur votre vie entre la Corée et le Canada ?

Je suis né et j’ai grandi en Corée du Sud, dans la ville de Jeonju, jusqu’à mes 18 ans. C’est à cet âge que j’ai déménagé avec ma famille au Canada, à Toronto. Une partie de ma famille du côté de mon père habitait déjà à Toronto. Quand je suis arrivé ici, je ne connaissais personne à part ma famille, donc j’ai essayé de trouver d’autres Coréens qui y habitaient. J’y suis resté cinq ou six ans avant de repartir en Corée pour commencer ma carrière de rappeur. Aujourd’hui, je suis revenu vivre au Canada.

Comment vous-êtes vous intéressé au hip-hop, et quand avez-vous commencé à faire de la musique ?

J’ai découvert le hip-hop quand j’étais encore petit, en primaire ou au collège, avec des rappeurs coréens comme Drunkun Tiger et MC Sniper, et je suis complètement tombé dedans. Quand j’ai émigré au Canada, j’ai commencé à écouter plus de hip-hop américain, et je m’en suis beaucoup nourri. J’ai rapidement commencé à écrire mes propres textes et à faire de la musique avec mes amis à Toronto, mais je ne prenais pas ça vraiment au sérieux au début.

Vous avez rencontré votre crew FPL (« Fuck Peace Love ») quand vous étiez à Toronto. Comment avez-vous commencé à faire de la musique avec Dbo, Briel et DZ ?

Je les ai rencontré sur internet parce que je voulais fréquenter d’autres Coréens qui habitaient à Toronto, et on a commencé à se rassembler tous les samedis soir dans le quartier de Yonge and Finch, où ils organisaient des sessions de freestyle. On est rapidement devenus très proches et on a même décidé de créer un crew. Au final, nous sommes tous repartis en Corée pour commencer officiellement notre carrière.

Dans votre nouvel album solo Everyday is 420, on constate une vraie évolution par rapport à vos anciens projets. D’un style trap assez sombre et agressif, vous passez à quelque chose de plus mature, calme et joyeux, également plus accessible commercialement. Comment décririez-vous le nouveau Kiggafromthe6 ?

Je pense que la musique qu’on crée dépend de notre vie, d’où on vient, de ce qu’on fait, et avec qui. Ces jours-ci, ma vie est plus apaisée et donc ma musique l’est aussi. Dans mon album, je montre différents styles qui dépendent de mon état d’esprit au moment où j’écris. Quand j’étais en Corée j’étais complètement obsédé par ma carrière, et être un étranger en Corée n’est pas facile, donc j’étais très stressé. (NdlR : Kiggafromthe6 a la nationalité canadienne). Ma musique était un moyen de me défouler et de me débarrasser de mon stress, je pense que c’est pour ça que ma musique était plus agressive à l’époque. Aujourd’hui, je me sens mieux dans ma vie et plus à l’aise avec moi-même.

Quelles chansons conseilleriez-vous à nos lecteurs qui ne vous connaissent pas encore et ont envie de vous découvrir ?

Allez tout de suite découvrir mon nouvel album ! (Rires.) Pour commencer vous pouvez écouter la chanson titre du projet : Errday Is 420. J’espère vraiment que vous aimerez !
Et sinon je conseillerais Musike, c’est celle que beaucoup de gens préfèrent et c’est une chanson que j’aimais particulièrement faire en live en Corée, parce que les autres membres de FPL sont avec moi sur scène et elle est très intense.

Après être revenu à Toronto, vous avez rejoins le crew Foreign Flow avec lequel vous avez récemment sorti l’album Midnight Toronto. Pourquoi cette collaboration avec JA$ et Millkissdrip ?

Je suis rentré à Toronto l’année dernière, en juillet 2019. Je connaissais déjà JA$ et il m’a proposé de passer à son studio. J’y ai rencontré Millkiss et nous avons enregistré un son ensemble tout de suite dès le jour de mon retour. Foreign Flow existait déjà et je les ai rejoins tout naturellement. Ensemble nous sommes incroyablement productifs. En un mois de studio, nous avions déjà créé trois albums, deux tous ensemble ainsi que mon album solo qui comporte beaucoup de featurings avec eux. Le nouvel album de Foreign Flow s’appellera Blue Night et sortira sûrement dans le courant de cet été.

Vous êtes très prolifique et vous sortez de nombreux morceaux et collaborations tous les ans, comment tenez-vous le rythme ?

En réalité, je n’écris pas vraiment de chansons, je trouve d’abord un beat que j’aime et je commence à faire du freestyle dessus. Ensuite, si ça m’a plu, je réécris pour enregistrer. Je me laisse juste porter par le flow, parfois je ne réécris même pas et j’enregistre juste en une prise. C’est pour ça que lorsque je suis inspiré, je peux créer de la musique très rapidement.

Quel artiste vous inspire le plus ?

Sans hésitation, Drake. Sinon j’écoute beaucoup d’artistes américains, pour moi le flow est plus important que les paroles, alors je me concentre surtout là-dessus quand j’écoute des morceaux.

Quels sont vos artistes favoris au sein de la scène hip-hop coréenne ?

Bien sûr les autres membres de FPL : Dbo, DZ et Briel ! Ou encore Don Mills avec qui j’ai collaboré au tout début de ma carrière. Sinon, je n’écoute pas trop de nouveaux rappeurs coréens, mais j’ai un respect immense pour The Quiett et Swings.

Vous utilisez beaucoup de mots anglais dans vos chansons en coréen. Avez-vous déjà pensé à écrire uniquement en anglais pour toucher un public plus international ?

Ces temps-ci, j’essaye d’utiliser de plus en plus d’anglais dans mes paroles parce que je veux d’abord développer ma carrière ici, à Toronto, et non pas à Séoul. J’ai été contacté par des artistes canadiens, et lorsque le confinement sera complètement terminé, je vais essayer de m’investir dans des projets avec eux.

Quels sont vos projets pour 2020 ?

Je viens de sortir mon album solo et très bientôt, ce sera le tour de l’album de notre crew, Blue Night. Je veux participer à des performances ou des concerts à Toronto, mais à cause du coronavirus, il est difficile de savoir comment la situation va évoluer et quand ce sera réellement possible. J’avais aussi prévu de tourner un clip, mais ç’a été annulé à cause du confinement, alors je le ferais dès que je le pourrais ! Et avant la fin de 2020… peut-être encore un autre album ? Vous verrez bien ! (Rires.)

Un dernier mot pour nos lecteurs ?

S’il-vous-plaît, faites attention à vous, restez en bonne santé et surtout soyez-vous même. Croyez en vous. J’espère vous voir bientôt en France ! Merci ! (NdlR : en français)

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Crédits photo 📸 kuzi / kiggafromthe6